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Une société décide de mettre un terme à une relation commerciale de 20 ans, sans préavis. Un comportement fautif, selon la société victime, pour qui cette rupture est bien trop brutale au vu de la pérennité de la relation d’affaires... Sauf que ces 6 dernières années, ce partenariat reposait sur un appel d’offres…ce qui change tout…
La pérennité des relations commerciales est une des clés du succès d’une entreprise. Pouvoir compter sur une activité à moyen ou long terme permet, en effet, à l’entrepreneur de se projeter. C’est pourquoi la loi protège les partenaires commerciaux d’une rupture brutale d’une relation commerciale établie.
La personne exerçant une activité de production, de distribution ou de services doit, si elle veut mettre fin à tout ou partie d’une relation d’affaires établie, respecter un préavis écrit qui tient compte de la durée de la relation, en se référant aux usages ou aux accords interprofessionnels.
En cas de non-respect de cette règle, l’entrepreneur engage sa responsabilité et doit réparer le préjudice causé à son ancien partenaire par la brutalité de la rupture de leur relation commerciale …
… Mais encore faut-il pour cela que ladite relation soit « établie », c’est-à-dire :
Qu’en est-il lorsque les contrats sont conclus à la suite d’un appel d’offres ?
La question s’est posée dans une affaire opposant une société de jouets et une société de transports. La première fait appel à la seconde pour une mission de transport routier. Pendant près de 15 ans, la relation commerciale se déroule de manière ininterrompue, par une succession de petits contrats de 1 an.
Les modalités sont ensuite modifiées : la société de jouets met en place une procédure d’appel d’offres que la société de transports remporte 6 années de suite…
…Avant de perdre le marché : la société de transports ne remporte pas l’appel d’offres et la société de jouets décide de mettre fin à leur collaboration, sans préavis.
Ce qui est inacceptable selon la société de transports : en l’absence de préavis écrit, la société s’estime victime d’une rupture brutale de relation commerciale établie et demande à être dédommagée.
Toute la question est donc de déterminer si cette relation commerciale était « établie », c’est-à-dire régulière, significative, stable et permettant à la société de transports de penser raisonnablement qu’elle allait se poursuivre avec la même stabilité.
C’est sans aucun doute une relation commerciale établie aux yeux de la société de transports, qui souligne que ses prestations se sont déroulées sur une période de 20 ans, appels d’offres compris.
« Non ! », tranche le juge : le fait de passer à une relation commerciale fondée sur un appel d’offres a modifié la nature de la relation en la précarisant. Le propre de l’appel d’offres est la mise en concurrence de professionnels et donc, l’incertitude de remporter le marché… ce qui empêche de qualifier la relation commerciale « d’établie ».
Par conséquent, la société de jouets n’avait pas à respecter de préavis. Elle n’a donc pas rompu de manière brutale la relation commerciale, et la demande d’indemnisation de la société de transports ne peut qu’être rejetée.Source : Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 11 janvier 2023, no 21-18299
Rupture brutale d’une relation commerciale : encore faut-il qu’il y ait une « relation commerciale »… © Copyright WebLex - 2023
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